❝ UN NAVIRE SANS CAPITAINE EST UN CERCUEIL QUI CHERCHE UNE FOSSE ❞
Un long soupire s’échappa de sa gorge tandis qu’elle contemplait à distance son navire. De là où elle se trouvait le Fer-de-Lance apparaissait comme une minuscule coque amarrée au quai. Tous les navires paraissaient d’ailleurs petits, mais leur silhouette n’enlevait rien à leur fierté et chacun connaissait la férocité des équipages qui les manoeuvraient. Nouveau soupire plein de désespoir alors que ses yeux observaient à présent la mer et ses embruns, les vagues s’échouant sur les rochers et les oiseaux marins survolant les flots à la recherche du déjeuner. Daghild n’avait qu’une hâte : retourner en mer. Voilà trop longtemps que ses pieds foulaient la terre. Si calme que fut la jeune femme, elle avait besoin de son lot d’action, d’activité, d’ordres à donner et surtout d’aventures. Elle avait soif de découvertes et de savoir. Cette longue période à terre la fatiguait plus qu’une longue traversée. Elle commençait à trouver le temps long et monotone. Les vents étaient favorables, et les Dieux non moins enclins à laisser le Fer-de-Lance naviguer. Alors pourquoi ? Elle sentait en elle monter un désir d’inconnu et de défi, comme un appel que la mer lui lançait, un challenge que les vagues lui demandaient de relever. Elle se sentait prête à se mesurer à eux. A son Destin. Ce dernier refusait obstinément de lui accorder le droit d’enfanter. Elle en avait donc conclu que les Dieux la réservaient aux batailles et à la guerre. Sinon pourquoi avoir gardé son corps intact de toute blessures dûes au combat ? Si les Dieux la destinaient à quelque chose, pourquoi devaient-elle attendre d’accomplir sa destinée ?
Parce que c’était ainsi. Et parce qu’elle avait juré loyauté et dévouement à son capitaine et amie.
Nouveau soupire tandis que d’un dernier regard elle embrassa les clôt. Daghild se détourna ensuite pour gravir les derniers mètres qui la séparait de la demeure d’Astrid. C’est bien dans le but de la voir qu’elle avait fait la route depuis les plages. Mais en chemin, au bord des falaises, elle s’était arrêter pour se perdre dans la contemplation de l’horizon. Cette horizon si mystérieux qui lui murmurait nombre d’aventures à venir. Mais l’heure n’était plus à la contemplation. Il fallait qu’elle parle à son capitaine, mais aussi à son amie…
D’un geste fait et refait des dizaine de centaines de fois, elle poussa la porte pour entrer.
« Astrid ! » Appela-t-elle pour signaler sa présence. D’un regard elle embrassa la pièce.
Cela faisait plusieurs jours, bizarrement, qu’elle n’avait pas vu la Fálkidóttir. Daghild avait été prise ailleurs, bien trop occupée à surveiller son équipage et à soigner son navire. Elle n’avait beau n’être que le Second du Fer-de-Lance, ce dernier était pour elle comme un foyer, un enfant et un ami. Chaque recoin du navire se devait d’être inspecté et nettoyer. Chaque cordage réparé. Elle contrôlait l’arrimage de chaque caisse ou marchandise qui passait sur son pont. Les filles qui faisaient partie de l’équipage, se devaient non seulement d’être de bonnes guerrières mais aussi d’excellents matelot. Si calme, et douce qu’elle paraissait, Daghild était extrêmement stricte et exigeante. Ses filles le savaient et c’est bien pour cela qu’elles ne se faisaient généralement pas répéter les choses deux fois. Après tout, c’était aussi là son rôle. Etre second, c’était être la voix entre le Capitaine et l’équipage. C’était comprendre ses matelots et leur permettre de travailler efficacement tout en faisant appliquer les ordres et la discipline du capitaine. Depuis le temps qu’elle naviguait, la jeune femme prenait son rôle très à coeur. Et c’est bien pour cette raison qu’il fallait qu’elle parle à Astrid. Au delà de son désir de reprendre la mer rapidement, elle voulait l’informer du comportement d’une des filles. Elle ne doutait pas du résultat, mais le protocole voulait qu’elle en informa son capitaine.
Voyant son amie approcher, Daghild lui sourit.
« Comment vas-tu ? »